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Pétition Pour un enseignement de la sélection naturelle au collège, dans le cadre du renouvellement des programmes de Sciences de la Vie et de la Terre

Pour:Conseil supérieur des programmes

Les programmes de sciences de la vie et de la terre au collège vont être renouvelés prochainement. Ce renouvellement constitue une opportunité exceptionnelle d’améliorer l’enseignement de la théorie de l’évolution pour l’ensemble d’une classe d’âge. En tant que biologistes de l’évolution, nous souhaitons exposer ici notre point de vue sur ce que devrait comporter cet enseignement. Plus précisément, nous pensons que le mécanisme de la sélection naturelle devrait y tenir une place centrale.

Si la publication de L’origine des espèces au moyen de la sélection naturelle est une révolution intellectuelle c’est parce que Darwin y résout pour la première fois un mystère vieux de plusieurs siècles : l’existence sur Terre de systèmes organisés capables de survivre et de se reproduire —les systèmes vivants. Et le mécanisme que découvre Darwin pour résoudre ce mystère est simple, et il est unique : c’est la sélection naturelle. Pourtant, si la sélection naturelle est citée dans les programmes de lycée, son fonctionnement et ses conséquences ne sont pas enseignés aux élèves. Le renouvellement des programmes de collège offre donc l’occasion d’expliquer, pour la première fois, ce mécanisme à tous les élèves de France.

Nous sommes conscients de la difficulté que constitue l’écriture de programmes scolaires et du nécessaire équilibre entre disciplines qu’elle impose. En la matière, cet enseignement s’inscrirait de façon naturelle dans le cadre du programme. En effet, la sélection naturelle donne leur unité conceptuelle à l’ensemble des sciences de la vie, parce qu’elle explique l’origine des fonctions complexes qui sont le propre du vivant et que les évolutionnistes appellent des adaptations (p. ex. la fonction de reproduction, la lutte contre les pathogènes, la régulation hormonale, le contrôle nerveux du comportement, etc.), fonctions qui sont déjà l’objet d’une grande partie des programmes de collège et de lycée. Ainsi, enseigner la sélection naturelle ne viendrait pas alourdir mais au contraire unifier l’enseignement des sciences de la vie.

Dans la suite de ce texte nous expliquons en détail pourquoi la sélection naturelle constitue bien le centre de gravité de la théorie de l’évolution et pourquoi son enseignement est essentiel. En annexe, nous proposons une façon de présenter ce mécanisme aux élèves de collège.

Réfuter l’argument téléologique : la sélection naturelle.
D’un point de vue physique, les êtres vivants sont des arrangements organisés et instables de la matière. Leur existence n’est possible que parce qu’ils accomplissent un ensemble de fonctions garantissant leur homéostasie et leur reproduction. Le cycle de Krebs produit de l'énergie. Le foie détoxifie le sang. Les bactéries se déplacent grâce à des flagelles. Etc. Jusqu’à Darwin, cette fonctionnalité faisait du vivant un mystère et appelait des solutions extra-scientifiques, autrement dit des causes finales. Darwin montre qu’il existe un mécanisme qui ne nécessite pas l’intervention de causes finales et qui permet de faire émerger des systèmes fonctionnels : la sélection naturelle.
La sélection naturelle agit à la manière d’un accumulateur. Parmi l’ensemble des modifications aléatoires introduites dans les organismes, dont la très large majorité sont néfastes, elle retient préférentiellement les rares modifications favorables. De génération en génération, elle accumule ainsi graduellement des améliorations, dotant finalement les systèmes vivants d’une organisation complexe impossible de produire par chance d’un seul coup, ceci sans qu’aucune intention, aucune cause finale, n’y préside.

La sélection naturelle : premier rôle dans l’évolution.
Certes, la sélection naturelle n’est pas toute puissante. L’évolution est aussi structurée par des mécanismes non adaptatifs, le hasard des mutations, les phénomènes catastrophiques, la chance des rencontres inter-spécifiques, les contraintes physiques, etc. Mais la sélection naturelle tient une place à part dans ce panorama.
Ce qui rend la survie et la reproduction des organismes vivants possibles et les distingue des autres objets naturels, nous l’avons déjà dit, c’est leur fonctionnalité. Un œil, un ribosome, le coeur humain, la fleur d’une orchidée, les enzymes du cycle de Krebs, si ces objets sont remarquables c’est parce qu’ils ont une fonction. L’analyse fonctionnelle est ainsi au coeur de toute la biologie. Harvey découvre la fonction du coeur dans la circulation sanguine. Claude Bernard établi le fonctionnement des grands systèmes de régulation homéostatique. Dans les programmes scolaires, les élèves étudient les fonctions nutritives, respiratoires, et reproductives. Ils comprennent comment fonctionne l’immunité, ou le système nerveux. Etc.

Le rôle premier de la théorie de l’évolution, en tant que fondement historique pour la biologie, c’est donc de rendre compte scientifiquement de cette fonctionnalité. Comment sur (au moins) une planète dans l’univers, la matière a-t-elle pu s’organiser en systèmes fonctionnels, capables de survivre et de se reproduire ? C’est la question que posent Darwin et tous les naturalistes avant lui et, à cette question, la sélection naturelle constitue la seule réponse scientifique disponible à ce jour.

Quelle que soit l’importance quantitative des contraintes, du hasard ou des autres forces non-adaptatives dans l’évolution, sans la sélection naturelle il n’y aurait sur Terre que des objets sans fonction, donc aucun système vivant. La sélection naturelle est donc au vivant ce que l’explosion est au moteur, le «truc» qui donne la solution. Dans un cours sur le moteur à explosion, un professeur qui commencerait par parler des frottements commettrait une erreur logique. Même si les frottements sont un aspect essentiel des moteurs et expliquent aussi une partie de leurs propriétés, on peut dire qu’ils sont logiquement secondaires par rapport au principe de l’explosion. Pour la même raison, quelle que soit leur importance quantitative, les forces non-adaptatives de l’évolution sont logiquement secondaires par rapport à la sélection naturelle et l’enseignement de l’évolution doit en tenir compte. La sélection naturelle, en tant que mécanisme offrant la solution scientifique à l’existence des objets vivants, doit y tenir la place centrale.

Le concept d’adaptation : un pont entre la théorie de l’évolution et le reste des sciences de la vie.
Pour désigner le caractère fonctionnel des objets vivants —produit de la sélection naturelle— le terme scientifique utilisé par les biologistes de l’évolution est celui d’adaptation. Un trait biologique est une adaptation si ses propriétés fines lui permettent manifestement de remplir une fonction. Par exemple, le système visuel des vertébrés est une adaptation destinée à percevoir le monde extérieur à partir de la projection de photons. Le système immunitaire est une adaptation destinée à protéger l’organisme des agents infectieux. L’hémoglobine est une adaptation destinée à transporter le dioxygène dans le sang. Etc.

Dans les programmes scolaires, lorsque les élèves découvrent le fonctionnement des organismes vivants, par exemple lorsqu’ils étudient la fonction de nutrition, le système immunitaire ou encore les mécanismes de réplication de l’ADN (voir annexe B), ils étudient donc en fait des adaptations. Ces adaptations ne sont pas « parfaites », elles sont toutes le produit de compromis et l’objet de contraintes, mais elles tirent leur origine d’une accumulation d’améliorations permise par la sélection naturelle et n’existeraient pas sans ce mécanisme.

Enseigner la sélection naturelle et son corollaire, l’adaptation, permet donc à la fois de rendre explicite et rigoureuse l’analyse des fonctions du vivant, déjà très présente dans les programmes du secondaire, et aussi d’expliquer l’origine évolutionnaire de ces fonctions. Plus que n’importe quel autre aspect de l’évolution, la sélection naturelle permet donc de construire un pont entre la théorie de l’évolution et le reste des sciences de la vie, en plaçant l’ensemble des fonctions biologiques étudiées en classe dans un cadre explicatif global.

Sélection naturelle et créationnisme.
Les élèves, comme tous les citoyens, peuvent constater par eux-mêmes l’extraordinaire fonctionnalité des systèmes vivants, observer que les yeux, les ailes, les organes internes sont des structures adaptées qui ne peuvent pas être le fruit du hasard. Les créationnistes utilisent d’ailleurs souvent cet argument. Pour eux, l’adaptation des systèmes biologiques ne peut pas être expliquée sans intentionnalité et constitue en cela un argument contre l’explication scientifique du monde. Pour lutter efficacement contre cet argument, il faut prendre acte du caractère fonctionnel des objets vivants et en donner une explication scientifique. Or, encore une fois, le seul mécanisme dont la science dispose pour expliquer une apparence de fonctionnalité dans un monde sans intention, c’est la sélection naturelle. Expliquer aux collégiens comment la sélection naturelle rend compte de l’émergence des propriétés les plus apparemment inexplicables, les plus merveilleuses, des organismes vivants, c’est donc leur donner les moyens de comprendre et pas seulement d’accepter la théorie de l’évolution et ainsi répondre à leurs interrogations profondes sur l’origine du vivant.

Conclusion.
Tous ceux qui ont eu la chance, un jour dans leur vie, de comprendre la sélection naturelle le disent : c’est l’un des plus grands plaisirs intellectuels qui soit, par le renversement de perspective qu’il implique. Mieux, au contraire de la mécanique quantique, de la relativité générale ou d’autres théories qui bouleversent aussi notre vision du monde, la sélection naturelle peut être expliquée facilement à tout le monde, de bout en bout. L’enseigner au collège c’est donc donner la possibilité à toute une classe d’âge d’éprouver le plaisir intellectuel unique que procurent les grandes avancées scientifiques.

Biologistes de l’évolution, nous nous permettons donc d’insister sur la nécessité de mettre la sélection naturelle et son corollaire, l’adaptation, au coeur de l’enseignement de notre discipline. Si le livre fondateur de la théorie de l’évolution a pour titre L’origine des espèces au moyen de la sélection naturelle, ce n’est pas une erreur de Darwin. Seule la sélection rend compte des propriétés exceptionnelles du vivant. En ce sens elle constitue le coeur conceptuel de la théorie de l’évolution et doit être enseignée comme telle.

Conscients de l’enjeu considérable que constitue l’enseignement de l’évolution, nous vous remercions par avance pour l’attention que vous y porterez et nous nous tenons à votre entière disposition pour participer en quelque manière que vous jugerez utile à la mise en place de cet enseignement.




Annexes

Annexe A.?Une proposition pour enseigner la sélection naturelle au collège.

Le collège présente l’avantage considérable de toucher tous les élèves d’une classe d’âge et donc tous les futurs citoyens. Expliquer l’origine des espèces vivantes de manière convaincante à ce niveau offre un potentiel éducatif considérable. Nous proposons pour cela une progression en deux étapes. Le mécanisme de la sélection naturelle est présentée dans la classe de troisième, mais le terrain conceptuel est préparé durant tout le collège.

1. Avant la classe de 3ème : préparation à l’acquisition du concept
Avant la classe de troisième on pourra présenter des fonctions du vivant en mettant en évidence leur caractère adaptatif (c-à-d fonctionnel). Pour cela, on pourra enseigner une grande partie du programme actuel de manière seulement légèrement différente.
Une large partie du programme actuel consiste déjà à expliquer le fonctionnement des organismes —la respiration, la nutrition, la reproduction, les communications nerveuse et hormonale, l’immunité, etc. Cet enseignement est donc fonctionnaliste (voir Annexe B). On pourra donc modifier légèrement son esprit en présentant explicitement les grandes fonctions du vivant comme des solutions, trouvées par l’évolution, pour résoudre des problèmes auxquels les organismes font face. A ce stade on n’expliquera pas encore par quel mécanisme ces solutions ont été trouvées (la sélection naturelle). Nous donnons ici trois exemples.
Dans la partie du programme qui concerne la respiration, on pourra expliciter le problème que pose la nécessité pour toutes les cellules d’un organisme multicellulaire de réaliser des échanges gazeux. On présentera alors la circulation sanguine des vertébrés comme une solution pour résoudre ce problème, celle qui consiste à faire circuler des gaz dissous dans un liquide sous pression. On pourra aussi présenter pour comparaison le système de trachées des insectes comme une autre solution, possible uniquement pour des organismes de petite taille.
Dans la partie qui concerne l’immunité, on exposera aux élèves le problème que constitue l’existence d’une grande diversité d’agents infectieux contre lesquels il est impossible d’avoir une immunité innée. On présentera ensuite le système immunitaire adaptatif des vertébrés comme une solution pour faire face à ce problème.
Cet enseignement permettra aux élèves de s’habituer à réfléchir au vivant en termes d’adaptations, les préparant à comprendre l’origine scientifique de ces adaptations.

2. En classe de 3ème : expliquer la sélection naturelle
En troisième on expliquera par quel mécanisme ces solutions adaptatives sont trouvées, la sélection naturelle. Cet enseignement pourra s’effectuer en trois temps.

(i) Le mécanisme de la sélection naturelle.
Il existe des manières très simples de présenter le mécanisme de la sélection. Certains logiciels par exemple présentent de manière visuelle une population vivante et les changements qui s’y produisent à cause de la reproduction différentielle des individus. Certains exemples de sélection rapide sont aussi très utiles. La phalène du bouleau est bien connu, mais l’évolution des guppies dans les rivières de Trinidad est potentiellement très riche. En l’espace de quelques années, ces guppies se sont adaptés à un nouvel environnement dépourvu de prédateurs, modifiant de nombreux aspects de leur morphologie, de leur traits d’histoire de vie (leur durée de vie notamment) et de leur comportement. La sélection artificielle et l’évolution rapide des espèces domestiquées pourront aussi être présentées ici.

(ii) La construction des organes complexes
On pourra ensuite expliquer comment le mécanisme de la sélection naturelle, répété sur des millions de générations, permet de construire des fonctions complexes par accumulation d’adaptations.
L’oeil est un excellent exemple ici pour quatre raisons. Premièrement, parce qu’on dispose d’informations relativement fiables sur les stades intermédiaires dans son évolution. Deuxièmement, parce qu’il permet d’illustrer le principe de la convergence qui est une des conséquences les plus visibles de la sélection naturelle ; deux phylums (vertébrés et céphalopodes) ont évolué des yeux très similaires de manière indépendante. Troisièmement, parce qu’il permet d’illustrer la diversité des solutions trouvées par l’évolution pour résoudre des problèmes semblables ; l’oeil à facette des insectes formé par répétition d’une ommatidie simple est une solution alternative à l’œil caméra des vertébrés et des céphalopodes. Quatrièmement, parce que l’exemple de l’œil permet de mettre en évidence aussi le fait que l’évolution n’est pas un ingénieur mais un bricoleur qui fonctionne sous contrainte ; la tâche aveugle de l’oeil des vertébrés (absente chez les céphalopodes) est une conséquence de ce bricolage propre à l’évolution par sélection naturelle.

(iii) Généralisation à l’ensemble du vivant
Une fois le principe et les conséquences de la sélection naturelle compris, afin de mettre en évidence la généralité du mécanisme, on pourra présenter une série d’exemples d’adaptations, en expliquant à chaque fois qu’elles tirent leur origine de la sélection. Entre autres, on pourra utiliser à ce stade des exemples naturalistes particulièrement marquants : le bec asymétrique des Rynchops, la queue du paon, le cou des girafes, la fleur des orchidées, etc. L’utilisation de films documentaires (p. ex. les films de David Attenborough) pourra être ici très intéressante en alliant une grande qualité pédagogique au plaisir du contact avec le vivant.



Annexe B.
Les adaptations biologiques déjà étudiées en classe

De nombreuses parties des programmes actuels de collège et de lycée ont pour objet des fonctions biologiques. Sans qu’ils soient présentés ainsi, ces parties du programme présentent donc aux élèves des adaptations. Enseigner la sélection naturelle permet de rendre compte scientifiquement de l’origine de ces adaptations. Cette annexe présente ces fonctions, classées par catégories. Nous commençons par un exemple qui constitue le modèle sur lequel l’ensemble des fonctions biologiques étudiées en classe pourraient être présenté.

Biologie végétale

Les relations entre organisation et mode de vie, résultat de l'évolution : l'exemple de la vie fixée chez les plantes (Term. S)

Il s’agit ici de la seule partie du programme dans laquelle (i) l’adéquation entre la structure et la fonction d’un système vivant est explicitée et (ii) cette adéquation est mise en relation avec l’évolution. Mais la sélection naturelle (la seule cause de cette adéquation) n’est pas citée.

Echanges, métabolisme
La digestion (5e)
La circulation sanguine (5e)
Les échanges de nutriments et de gaz (5e)
Les appareils respiratoires (5e)
Le métabolisme (5e, 2nde)
L’élimination des déchets (5e)

Reproduction, génétique
La reproduction sexuée (4e)
L'implantation et le développement de l’embryon (4e)
la mitose et la méiose (3e, Term. S)
La réplication, traduction et transcription de l’ADN (1e S)
La fécondation (Term. S)

Physiologie, régulation et homéostasie

Le système immunitaire (3e, Term. S)
Le système nerveux (4e, 2nde, 1e S, Term. S)
La régulation de la tension arterielle (2nde)
Le contrôle de la reproduction (1e S)
La vision (1e S)
La réponse à l’effort (2nde)
La régulation de la Glycémie (Term. S en specialité)


Les signataires

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